Point culminant du département du Var (à 1715 m d’altitude), le mont Lachens est “la“ montagne d’un département avant tout connu pour ses plages et multiples stations balnéaires. Le “toit du Var“, ainsi qu’il est logiquement surnommé, domine entre autres la commune de Mons, là serpentent les premiers kilomètres de conduite de l’Aqueduc romain, celui-là même qui, durant l’Antiquité, amenait l’eau jusqu’au cœur de Fréjus / Forum Iiuli (**).
De cet état de fait a… trotté dans la tête de plusieurs athlètes de la section athlé-trail de l’AMSLF un projet, plus exactement un défi : relier Fréjus à Mons en suivant la “route“ de l’Aqueduc, « au fil de l’eau en remontant à la source », argumente joliment Aurélien De Sa, l’un des trailers en question.

Sept trailers
à l’assaut du Lachens

L’idée a fait son chemin et c’est ainsi que, le matin du jeudi de l’Ascension, six (*) de ces trailers se sont élancés depuis la porte d’Orée à Fréjus, direction plein nord jusqu’au site de Fondurane – extrémité amont du Lac de Saint-Cassin, dans la plaine de Montauroux -, première étape qui correspond premier tronçon alors bâti par les Romains (**).
Ici, déjà accompagnés par Rodolphe Pogorely, coach dévolu au suivi et au ravitaillement, étaient rejoints par un nouveau compagnon d’aventure.

La suite de l’aventure amenait nos sept mercenaires sur la seconde partie de leur périple, jusqu’à la source de la Siagnole, non sans quelques passages « parfois un peu galère, à quatre pattes, voire même en rampant à certains endroits, notamment du côté de la Roche Taillée au-dessus de Callian », se remémore encore Aurélien De Sa.

Après une pause restauration à hauteur de Mons, ultime effort – et non des moindres – sur les traces de la source qui alimente l’aqueduc : parcourir les 16 derniers kilomètres, agrémentés d’un charmant dénivelé de 900 m, jusqu’au sommet du Lachens pour, enfin, tout un symbole dans le froid, la pluie et le vent, atteindre cette toute première goutte, destinée quant à elle à effectuer le chemin inverse pour “redescendre“ vers la mer jusqu’à Fréjus.

De 6h30 à 8h d’ascension

 

Première réussie (en 6h30 pour les meilleurs, 90’ supplémentaires pour les moins aguerris), objectif réalisé – et par conséquent réalisable ! Et l’idée qui germe de voir ce périple se décliner dans un avenir plus ou moins lointain sous une forme plus… officielle. « Il y a beaucoup de passages en forêt domaniale, mais certains autres sur des sites privés : il conviendrait donc de passer des accords deci-delà, mais cela pourrait être envisageable en effet. »
Et dans le même genre d’idées, n’a-t-on pas déjà, au fil de 100 km, la célèbre randonnée VTT “Du Lachens à la mer“, avec arrivée sur la plage de la Garonnette aux Issambres.
Aussi, pourquoi n’imaginerait-on pas dans les années à venir, un trail longue distance ? Une épreuve à mi-chemin entre un “ultra“ – à partir de 100 km – (“l’UTMB“ (Ultra-trail du Mont-Blanc ou “La Diagonale des fous“ à la Réunion qui relie le sud au nord en passant par les trois cirques de celle que l’on surnomme l’île intense – et un trail plus classique .

Un trail officiel à terme ?

Car l’AMSLF-athlétisme, n’oublions pas, organise déjà depuis une dizaine d’années les Trails d’Hermès au cœur du massif de l’Estérel, depuis le parc de la chapelle Cocteau. Cet évènement que l’on imagine aisément serait alors une autre excellente manière de célébrer et satisfaire l’engouement d’une discipline en plein essor !

Et si jamais des lecteurs se montraient intéressés pour marcher sur les traces de ces pionniers trailers amsélistes, il n’est pas inutile de rappeler qu’il convient de respecter sites traversés et monuments rencontrés, aériens ou souterrains…

 


 

(*) Six trailers à l’assaut du Lachens

Drivés par le coach Rodolphe Pogorely, également en charge de l’assistance tout au long du parcours, ils sont six, sociétaires de la section “trail“ de l’AMLSF Athlétisme à avoir pris la route du Lachens : Aurélien De Sa, notre interlocuteur, était ainsi accompagné de Dadi Belaribi, Marc Ripoll, Luigi Mammola, Christophe Chabannier, Romain Husson et encore Serge Lopez.

 

(**) L’Aqueduc romain de Mons à Fréjus : l’histoire

42 (kilomètres), 481 (mètres de dénivelé), 36 (ponts-aqueducs) et 20 (années de construction avant la mise en service), tels sont les chiffres-clés de l’Aqueduc romain de Fréjus.
Les Romains, passés maîtres dans l’acheminent de l’eau – le terme aqueduc est titré du latin “aquae ductus“ (aqua, eau ; ductus, conduire) – savaient tout autant sélectionner les lieux adéquats pour s’établir, s’assurant avant tout de disposer de manière pérenne d’un approvisionnement en eau, denrée essentielle et vitale pour qui espère se sédentariser et se développer durablement.

Le retour de l’eau courante à Fréjus

Après étude, la construction de l’Aqueduc daterait de la seconde moitié du 1er siècle, réalisée en deux temps, captant initialement la source de la Foux à Montauroux puis, cette dernière ne suffisant plus, celle de la Siagnole à Mons. L’ouvrage – la plus grande partie en étant souterraine pour des raisons pratiques – aurait à coup sûr été utilisé durant plus de 400 ans…

Avant de gagner Forum Iiuli, l’Aqueduc prenait son départ au pied des falaises calcaires, à 515 m d’altitude, conduisant les eaux de la Siagnole depuis la source de cette rivière jusqu’au point le plus haut de Fréjus, à la butte du Moulin à Vent, à 34 m d’altitude, là où se trouvait le château d’eau (castellum divisorium).
En 1894, sur l’actuelle place Paul-Vernet – alors dénommée le cours Chevalier -, a été inaugurée la fontaine des Quatre Parties du Monde, commémorant le retour de l’eau courante à Fréjus. Quelque 25 années plus tôt (1870), un décret impérial avait fixé les conditions de partage des eaux de la Siagnole, de nouveau captée pour l’occasion. Et une bonne partie de l’Aqueduc romain avait été utilisée pour cette réalisation…

Roche Taillée,
arches “Sénéquier“

Quelques sites particulièrement remarquables jalonnent les 42 kilomètres du parcours. À l’image de la Roche Taillée, canal d’une grande ampleur (50 m de longueur sur 20 m de profondeur) directement creusé dans la roche, deux kilomètres en aval de la source. Mais encore des arches “Sénéquier“, deux ponts-aqueducs bâtis parallèlement à quelques mètres de distance, dont les vestiges à proximité de Fréjus (entre Malpasset et le Gargalon) sont aujourd’hui (depuis le 12 juillet… 1886, et comme l’ensemble de l’ouvrage) classés au titre des Monuments historiques.
Au fil de son parcours, l’Aqueduc romain a fait l’objet depuis 1941 de nombreuses campagnes de restauration et consolidation, certaines encore tout récemment – 2018 pour deux piles des arches dites de Sainte-Croix avenue du XVe Corps -, voire en cours à l’image des vestiges au cœur du parc de la villa Aurélienne.